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Les Ballades

Photo du rédacteur: jjsibillajjsibilla

Dernière mise à jour : 11 août 2021






BALLADE

DES DAMES DU TEMPS JADIS



Dites-moi où, n'en quel pays

Est Flora la belle Romaine,

Archipiades ne Thaïs

Qui fut sa cousine germaine;

Echo, parlant quand bruit on mène

Dessus rivière ou sur étang,

Qui beauté ot trop plus qu'humaine ?

Mais où sont les neiges d'antan ?


Où est la très sage Héloïs,

Pour qui fut châtré et puis moine

Pierre Esbaillart à Saint-Denis ?

Pour son amour ot cette essoine.

Semblablement, où est la roine

Qui commanda que Buridan

Fût jeté en un sac en Seine ?

Mais où sont les neiges d'antan ?


La roine Blanche comme un lis

Qui chantoit à voix de seraine,

Berthe au plat pied, Bietrix, Aliz,

Haramburgis qui tint le Maine,

Et Jeanne, la bonne Lorraine

Qu'Anglois brûlèrent à Rouen;

Où sont-ils, où, Vierge souveraine ?

Mais où sont les neiges d'antan ?


Prince, n'enquerrez de semaine

Où elles sont, ne de cet an,

Qu'à ce refrain ne vous remaine :

Mais où sont les neiges d'antan ?




BALLADE

DES SEIGNEURS DU TEMPS JADIS



Qui plus, où est li tiers Calixte,

Dernier décédé de ce nom,

Qui quatre ans tint le papaliste ?

Alphonse le roi d'Aragon,

Le gracieux duc de Bourbon;

Et Artus le duc de Bretagne,

Et Charles septième le bon ?

Mais où est le preux Charlemagne ?


Semblablement, le roi scotiste

Qui demi face ot, ce dit-on,

Vermeille comme une émastique

Depuis le front jusqu'au menton ?

Le roi de Chypre de renom,

Hélas ! et le bon roi d'Espagne

Duquel je ne sais pas le nom ?

Mais où est le preux Charlemagne ?


D'en plus parler je me désiste;

Ce n'est que toute abusion.

Il n'est qui contre mort résiste

Ne qui treuve provision.

Encor fais une question :

Lancelot le roi de Behaygne,

Où est-il, où est son tayon ?

Mais où est le preux Charlemagne ?


Où est Claquin, le bon Breton ?

Où le comte Dauphin d'Auvergne,

Et le bon feu duc d'Alençon ?

Mais où est le preux Charlemagne ?




BALLADE

EN VIEIL LANGAGE FRANCOIS



Car, ou soit ly sains appostolles

D'aubes vestuz, d'amys coeffez,

Qui ne seint fort saintes estolles

Dont par le col prent ly mauffez

De mal talant tous eschauffez,

Aussi bien meurt que filz servans,

De ceste vie cy brassez :

Autant en emporte ly vens.


Voire, ou soit de Constantinobles

L'emperieres au poing dorez,

Ou de France le roy tres nobles

Sur tous autres roys decorez,

Qui pour luy grant Dieux adorez

Batist esglises et couvens,

S'en son temps il fut honnorez,

Autant en emporte ly vens.


Ou soit de Vienne et Grenobles

Ly Dauphin, le preux, ly senez,

Ou de Digons, Salin et Dolles

Ly sire, filz le plus esnez

Ou autant de leurs gens prenez,

Heraux, trompectes ,poursuivans,

Ont ilz bien boutez soubz le nez ?

Autant en emporte ly vens.


Prince a mort sont tous destinez,

Et tous autres qui sont vivans :

S'ilz en sont courciez n'atinez,

Autant en emporte ly vens.




BALLADE

DE LA BELLE HËAUMIERE

AUX FILLES DE JOIE


<< Or y pensez, belle Gautière

Qui écolière souliez être,

Et vous, Blanche la Savetière,

Or est-il temps de vous connaître,

Prenez à dêtre ou à senêtre;

N'épargnez homme je vous prie :

Car vieilles n'ont ne cours ne être,

Ne que monnoie qu'on décrie.


<< Et vous, la gente Saucissière

Qui de danser êtes adêtre,

Guillemette la Tapissière,

Ne méprenez vers votre maître :

Tôt vous faudra clore fenêtre,

Quand deviendrez vieille, flétrie :

Plus ne servirez qu'un vieil prêtre,

Ne que monnoie qu'on décrie.


Jeanneton la Chaperonnière,

Gardez qu'ami ne vous empêtre;

Et Catherine la Boursière,

N'envoyez pas les hommes paître;

Car qui belle n'est, ne perpère

Leur male grâce, mais leur rie,

Laide vieillesse amour n'empètre

Ne que monnoie qu'on décrie.


Filles, veuillez vous entremettre

D'écouter pourquoi pleure et crie :

Pour ce que je ne me puis mettre

Ne que monnoie qu'on décrie.



DOUBLE BALLADE


Pour ce, aimez tant que vous voudrez,

Suivez assemblées et fêtes,

En la fin ja mieux n'en vaudrez

Et n'y romperez que vos têtes;

Folles amours font les gens bêtes :

Salmon en idolatria,

Samson en perdit ses lunettes.

Bien heureux est qui rien n'y a !


Orpheüs le doux ménétrier,

Jouant de flûtes et musettes

En fut en danger du meurtrier

Chien Cerbérus à quatre têtes;

Et Narcissus, le bel honnêtes,

En un parfond puits se noya

Pour l'amour de ses amourettes.

Bien heureux est qui rien n'y a !


Sardana, le preux chevalier

Qui conquit le règne de Crètes,

En voulut devenir moulier

Et filer entre pucelettes:

David le roi, sage prophètes,

Crainte de Dieu en oublia,

Voyant laver cuisses bien faites.

Bien heureux est qui rien n'y a !


Amon en vout déshonourer,

Feignant de manger tartelettes,

Sa soeur Thamar et déflourer,

Qui fut chose mout, déshonnêtes;

Hérode, pas ne sont sornettes,

Saint Jean-Baptiste en décola

Pour danses, sauts et chansonnettes.

Bien heureux est qui rien n'y a !


De moi, pauvre, je veuil parler :

J'en fus battu comme à ru teles,

Tout nu, ja ne le quiers celer.

Qui me fit mâcher ces groselles,

Fors Catherine de Vaucelles ?

Noël, le tiers, ait, qui fut la

Mitaines à ces noces telles !

Bien heureux est qui rien n'y a !


Mais que ce jeune bacheler

Laissât ces jeunes bachelettes ?

Non ! et le dût-on brûler

Comme un chevaucheur d'écouvettes.

Plus douces lui sont que civettes;

Mais toutefois fol s'y fia :

Soient blanches, soient brunettes,

Bien heureux est qui rien n'y a !




BALLADE

POUR PRIER NOTRE DAME


Dame du ciel, régente terrienne,

Emperière des infernaux palus,

Recevez-moi votre humble chrétienne,

Que comprise soie entre vos élus,

Ce nonobstant qu'onques rien ne valus.

Les biens de vous, ma Dame et ma Maîtresse,

Sont trop plus grands que ne suis pécheresse,

Sans lesquels biens âme ne peut mérir

N'avoir les cieux. Je n'en suis jangleresse :

En cette foi je veuil vivre et mourir.


A votre Fils dites que je suis sienne;

De lui soient mes péchés abolus;

Pardonne moi comme à l'Egyptienne

Ou comme il fit au clerc Theophilus,

Lequel par vous fut quitte et absolus

Combien qu'il eût au diable fait promesse.

Préservez-moi que ne fasse jamais ce,

Vierge portant, sans rompure encourir,

Le sacrement qu'on célèbre à la messe :

En cette foi je veuil vivre et mourir.


Femme je suis pauvrette et ancienne,

Qui rien de sais, oncques lettres ne lus.

Au moutier vois; dont suis paroissienne,

Paradis peint où sont harpes et luth,

Et un enfer où damnés sont bouillus :

L'un me fait peur, l'autre joie et liesse.

La joie avoir me fais, haute déesse,

A qui pécheurs doivent tous recourir,

Comblés de foi, sans feinte ne paresse :

En cette foi je veuil vivre et mourir.


Vous portâtes, digne Vierge, princesse,

Iésus régnant qui n'a ne fin ne cesse.

Le Tout-Puissant, prenant notre faiblesse,

Laissa les cieux et nous vint secourir,

Offrit à mort sa très clère jeunesse;

Notre Seigneur tel est, tel le confesse :

En cette foi je veuil vivre et mourir.




BALLADE A S'AMIE


Fausse beauté qui tant me côute cher,

Rude en effet, hypocrite douleur,

Amour dure plus que fer à mâcher,

Nommer que puis, de ma défaçon seur,

Cherme félon, la mort d'un pauvre coeur,

Orgueil mussé qui gens met au mourir,

Yeux sans pitié, ne veut Droit de Rigueur,

Sans empirer, un pauvre secourir ?


Mieux m'eût valu avoir été sercher

Ailleurs secours, c'eût été mon honneur;

Rien ne m'eût su hors de ce fait hâcher

Trotter m'en faut en fuite et déshonneur.

Haro, haro, le grand et le mineur !

Et qu'est-ce ci ? Mourrai sans coup férir ?

Ou Pitié veut, selon cette teneur,

Sans empirer, un pauvre secourir ?


Un temps viendra qui fera dessécher

Jaunir, flétrir votre épanie fleur;

Je m'en risse, se tant pusse mâcher,

Las ! mais nenni, ce seroit donc foleur :

Vieil je serai, vous laide, sans couleur

Or buvez fort, tant que ru peut courir;

Ne donnez pas à tous cette douleur,

Sans empirer, un pauvre secourir.


Prince [amoureux], des amants le graigneur

Votre mal gré ne voudroie encourir,

Mais tout franc coeur doit, par Notre Seigneur,

Sans empirer, un pauvre secourir.




BALLADE ET ORAISON


Père Noé, qui plantâtes la vigne,

Vous aussi, Loth, qui bûtes ou rocher,

Par tel parti qu'Amour qui gens engigne

De vos filles si vous fit approcher

(Pas ne le dis pour vous le reprocher),

Archetriclin, qui bien sûtes cet art,

Tous trois vous pri que vous veuillez pêcher

L'âme du bon feu maître Jean Cotart !


Jadis extrait il fut de votre ligne,

Lui qui buvoit du meilleur et plus cher,

Et ne dût-il avoir vaillant un pigne;

Certes, sur tous, c'étoit un bon archer :

On ne lui sut pot des mains arracher;

De bien boire oncques ne fut fêtart.

Nobles seigneurs, ne souffrez empêcher

L'âme du bon feu maître Jean Cotart !


Comme homme vieil qui chancelle et trépigne,

L'ai vu souvent, quand il s'alloit coucher,

Et une fois il se fit une bigne,

Bien m'en souvient, pour la pie juchier;

Bref, on n'eût su en ce monde cercher

Meilleur pïon, pour boire tôt ou tard.

Faites entrer quand vous orrez hucher

L'âme du bon feu maître Jean Cotart !


Prince, il n'eût su jusqu'à terre cracher;

Toujours crioit : << Haro ! la gorge m'ard . >>

Et si ne sut onc sa seuf étancher

L'âme du bon feu maître Jean Cotart .




BALLADE

POUR ROBERT D'ESTOUTEVILLE


Au point du jour, que l'épervier sébat,

Mû de plaisir et par noble coutume,

Bruit la mauvis et de joie s'ébat,

Reçoit son pair et se joint à sa plume,

Offrir vous veuil, à ce Désir m'allume,

Ioyeusement ce qu'aux amants bon semble.

Sachez qu'Amour l'écrit en son volume,

Et c'est la fin pour quoi sommes ensemble.


Dame serez de mon coeur, sans débat,

Entièrement, jusque mort me consume,

Laurier souef qui pour mon droit combat,

Olivier franc m'ôtant toute amertume,

Raison ne veut que je désaccoutume,

( Et en ce veuil avec elle m'assemble ),

De vous servir, mais que m'y accoutume;

Et c'est la fin pour quoi sommes ensemble.


Et qui plus est, quand deuil sur moi s'embat,

Par Fortune qui souvent si se fume,

Votre doux oeil sa malice rabat,

Ne mais ne mains que le vent fait la fume.

Si ne perds pas la graine que je sume

En votre champ quand le fruit me ressemble.

Dieu m'ordonne que le fouïsse et fume;

Et c'est la fin pour quoi sommes ensemble.


Princesse, oyez ce que ci résume :

Que le mien coeur du vôtre désassemble

Ja ne sera; tant de vous en présume;

Et c'est la fin pour quoi sommes ensemble.




BALLADE


En riagal, en arsenic rocher,

En orpiment, en salpêtre et chaux vive,

En plomb bouillant pour mieux les émorcher,

En suif et poix détrempés de lessive

Faite d'étrons et de pissat de juive,

En lavailles de jambes à meseaux,

En raclure de pieds et vieux houseaux,

En sang d'aspic et drogues venimeuses,

En fiel de loups, de renards et blaireaux,

Soient frites ces langues ennuyeuses !


En cervelle de chat qui hait pêcher,

Noir et si vieil qu'il n'ait dent en gencive,

D'un vieil mâtin qui vaut bien aussi cher,

Tout enragé, en sa bave et salive,

En l'écume d'une mule poussive

Détranchée menue à bon ciseaux,

En eau où rats plongent groins et museau

Raine, crapauds et bêtes dangereuses,

Serpents, lézards et tels nobles oiseaux,

Soient frites ces langues ennuyeuses !


En sublimé dangereux à toucher,

Et ou nombril d'une couleuvre vive,

En sang qu'on voit ès palettes sécher

Sur les barbiers quand lune arrive,

Dont l'un est noir, l'autre plus vert que cive,

En chancre et fic, et en ces claires eaues

Où nourrices essangent leurs drapeaux,

En petits bains de filles amoureuses

( Qui ne m'entend n'a suivi les bordeaux )

Soient frites ces langues ennuyeuses !


Prince, passez tous ces friands morceaux,

S'étamine, sac n'avez ou bluteaux,

Parmi le fond d'unes braies breneuses;

Mais, par avant, en étrons de pourceaux

Soient frites ces langues ennuyeuses !




LES CONTREDITS

DE FRANC GONTIER

ballade


Sur mol duvet assis, un gras chanoine,

Lez un brasier, en chambre bien nattée,

A son côté gisant dame Sidoine

Blanche, tendre, polie et attintée,

Boire hypocras, à jour et à nuitée,

Rire, jouer, mignonner et baiser,

Et nu à nu, pour mieux des corps s'aiser,

Les vis tous deux, par un trou de mortaise :

Lors je connus que, pour deuil apaiser,

Il n'est trésor que de vivre à son aise.


Se Franc Gontier et sa compagne Hélène

Eussent cette douce vie hantée,

D'oignons, civots, qui causent forte haleine

N'acontassent une bise tostée.

Tout leur maton, ne toute leur potée,

Ne prise un ail, je le dis sans noiser.

S'ils se vantent coucher sous le rosier,

Lequel vaut mieux ? Lit côtoyé de chaise ?

Qu'en dites-vous ? Faut-il à ce muser ?

Il n'est trésor que de vivre à son aise.


De gros pain bis vivent d'orge et d'avoine,

Et boivent eaue tout au long de l'année.

Tous les oiseaux d'ici en Babyloine

A tel école une seule journée

Ne me tendroient, non une matunée.

Or d'ébatte, de par Dieu, France Gontier,

Hélène o lui, sous le bel églantier :

Se bien leur est, cause n'ai qu'il me pèse;

Mais quoi qu'il soit du laboureur métier,

Il n'est trésor que de vivre à son aise.


Prince, juge, pour tôt nous accorder.

Quant est de moi, mais qu'à nul ne déplaise,

Petit enfant, j'ai oï recorder :

Il n'est trésor que de vivre à son aise.



BALLADE DES FEMMES DE PARIS


Quoiqu'on tient belles langagères

Florentines, Vénitiennes,

Assez pour être messagères,

Et mêmement les anciennes;

Mais soient Lombardes, Romaines,

Genevoises, à mes périls,

Pimontoises, Savoisiennes,

Il n'est bon bec que de Paris.


De beau parler tiennent chaïères,

Ce dit-on, les Napolitaines,

Et sont très bonnes caquetières

Allemandes et Prussiennes;

Soient Grecques, Egyptiennes,

De Hongrie ou d'autres pays,

Espagnoles ou Catelennes,

Il n'est bon bec que de Paris.


Brettes, Suisses n'y savent guères,

Gasconnes, n'aussi Toulousaines :

De Petit Pont deux harengères

Les concluront, et les Lorraines,

Angloises et Calaisiennes,

( Ai-je beaucoup de lieux compris ? )

Picardes de Valencienne;

Il n'est bon bec que de Paris.


Prince, aux dames Parisiennes

De bien parler donnez le prix;

Quoi que l'on die d'Italiennes,

Il n'est bon bec que de Paris.




BALLADE

DE LA GROSSE MARGOT


Se j'aime et sers la belle de bon hait,

M'en devez-vous tenir ne vil ne sot ?

Elle a en soi des biens à fin souhait.

Pour son amour ceins bouclier et passot;

Quand viennent gens, je cours et happe un pot,

Au vin m'en vois, sans démener grand bruit;

Je leur tends eau, fromage, pain et fruit.

S'ils payent bien, je leur dis que << bien stat ;

Retournez ci, quand vous serez en ruit,

En se bordeau où tenons notre état. >>


Mais adoncques il y a grand déhait

Quand sans argent s'en vient coucher Margot;

Voir ne la puis, mon coeur à mort la hait.

Sa robe prends, demi-ceint et surcot,

Si lui jure qu'il tendra pour l'écot.

Par les côtés se prend cet Antéchrist,

Crie et jure par la mort de Jésus-Christ

Que non fera. Lors empoigne un éclat;

Dessus son nez lui en fais un écrit,

En se bordeau où tenons notre état.


Puis paix se fait et me fait un gros pet,

Plus enflé qu'un velimeux escarbot.

Riant, m'assied son poing sur mon sommet,

<< Go! go! >> me dit, et me fiert le jambot.

Tous deux ivres, dormons comme un sabot.

Et au réveil, quand le ventre lui bruit,

Monte sur moi que ne gâte son fruit.

Sous elle geins, plus qu'un ais me fais plat,

De paillarder tout elle détruit,

En se bordeau où tenons notre état.


Vente, grêle, gèle, j'ai mon pain cuit.

Ie suis paillard, la paillarde me suit.

Lequel vaut mieux ? Chacun bien s'entresuit.

L'un l'autre vaut; c'est à mau rat mau chat.

Ordure aimons, ordure nous assuit;

Nous défuyons honneur, il nous défuit,

En se bordeau où tenons notre état.




BALLADE DE BONNE DOCTRINE

A CEUX DE MAUVAISE VIE


<< Car ou soies porteur de bulles,

Pipeur ou hasardeur de dés,

Tailleur de faux coins et te brûles

Comme ceux qui sont échaudés,

Traîtres parjurs, de foi vidés;

Soies larron, ravis ou pilles :

Où en va l'acquêt, que cuidez ?

Tout aux tavernes et aux filles.


<< Rime, raille, cymbale, luthes,

Comme fol feintif, éhonté;

Farce, brouille, joue des flûtes;

Fais, ès villes et ès cités,

Farces, jeux et moralités,

Gagne au berlan, au glic, aux quilles,

Aussi bien va, or écoutez !

Tout aux tavernes et aux filles.


<< De tels ordures te recules,

Laboure, fauche champs et prés,

Sers et panse chevaux et mules,

S'aucunnement tu n'es lettrés;

Assez auras, se prends en grés.

Mais, se chanvre broyes ou tilles,

Ne tends ton labour qu'as ouvrés

Tout aux tavernes et aux filles.


<< Chausses, pourpoints aiguilletés,

Robes, et toutes vos drapilles,

Ains que vous fassiez pis, portez

Tout aux tavernes et aux filles.








































































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